Première sortie que j'allais enfin faire depuis l'arrivée de Morgane. J'étais resté cloîtré à la maison sans cesse, si ce n'est la fois où j'avais été dévaliser l'épicerie du coin en lait en poudre, en biberon et tout le tralala. Je pris la petite dans mes bras, soupirant légèrement avant de lui enfiler une sorte de robe en jeans où étaient présents quelques motifs roses représentant des fleurs, des étoiles, des coeurs et tout ce qui était mignon une fois porté sur une fille. Je lui enfilais ensuite un gilet blanc avec une capuche, souriant légèrement en voyant à quel point elle était adorable. Elle était tellement à croquer, cette princesse. Moi qui n'aimait pas les gosses auparavant, j'avais bien changé depuis son arrivée à tel point que ça en devenait presque bizarre. Enfin, bref. Une fois qu'elle fut prête, que je fus également lavé et habillé, je la mit dans son cosy et l'installait dans la voiture, roulant ensuite rapidement jusqu'au starbucks du centre ville, allant me garer dans le parking tout en jetant un coup d'oeil aux voitures présentes autour de moi, mon regard s'arrêtant sur une d'entre elles particulièrement. Et merde, qu'est-ce qu'il venait faire ici celui-là ? Car oui, la plaque de voiture de mon frère, je la reconnaitrai entre milles. Allez, avec un peu de chance, il ne me repérera pas lorsque je rentrerais dans le café, même si j'étais convaincu du contraire. J'arrêtais la voiture, prenant le cosy où était présente dans le petite tout en me disant que, malgré tout, c'était quand même plus pratique les fois où je débarquais sans rien à porter puis je franchis la porte, faisant de mon mieux pour ne pas balayer la pièce du regard et croiser le regard de mon frère. Tout mais pas ça, par pitié.

Ma mâchoire se serra machinalement en entendant cette voix trop familière prononcer mon nom. J'avais envie de jouer au parfait petit innocent, de lui faire croire que je n'étais pas son frère sans croiser son regard et pourtant, je savais qu'il m'avait déjà crame. C'était pas si difficile de reconnaître un membre de sa famille, et mon frère était loin d'être un crétin dépourvu de cervelle. Je resserrais ma prise sur le cosy contentant ma fille, me tournant lentement vers lui en soupirant tandis que certaines personnes avaient dardé leur regard sur nous deux. C'est sûr qu'on ne pouvait pas croire comme ça, aux premiers abords, qu'on était frères. J'avais pris tout ce qui était physique du côté de ma mère tandis que lui avait prit tout du côté de notre père. Le seul truc qui nous liait physiquement parlant c'était le fait que nous avions tous les deux la peau bronzée, ce qui n'était pas quelque chose de vraiment phénoménal étant donné que les italiens n'étaient pas vraiment censés être blancs comme des linges. Enfin, bref. Je fusillais les gens nous regardant d'un regard mauvais, n'étant pas vraiment d'humeur à supporter la curiosité des personnes aujourd'hui. « Y'a rien à voir. Oui, c'est moi, Loïc. Qu'est-ce que tu viens faire là ? » lui demandais-je en haussant un sourcil, jetant un regard à la petite qui se réveillait lentement dans son cosy. Heureusement que j'avais pensé à lui foutre sa tétine dans le bec avant qu'elle ne s'endorme, sinon ça aurait été concert pour l'ensemble des personnes présentes.

Je n'aimais pas de me retrouver face à mon frère. Il avait toujours été le préféré et je lui faisais payer en étant froid, distant et même parfois mesquin et méchant avec lui même s'il n'avait rien demandé. Et d'un sens, je lui en voulais aussi d'avoir quitté la ville pour s'éloigner de moi, du moins c'est ce que les parents m'ont toujours dit et je ne lui ai jamais posé la question à lui en personne pour vérifier si c'était vrai, me disant que mes parents ne me mentiraient pas sur ça, même si maintenant, j'en étais beaucoup moins convaincu. Je ne pus me retenir de rouler des yeux lorsqu'il me parla de son école de chant. Comme si je n'étais pas au courant de ça. « - Bien entendu que je suis au courant que tu es dans une école de danse. Nos parents ne se sont pas gênés pour nous le dire, pourquoi se priveraient-ils se venter le talent de leur fils prodige à leur fils raté ? » lui demandais-je en haussant légèrement les sourcils. Mes parents m'avaient toujours considéré comme le pire des imbéciles, simplement parce que mon frère avait percé plus vite dans le métier et qu'il savait plus ce qu'il voulait faire de sa vie que moi. Puis même côté caractère et durant notre plus 'tendre' enfance, il avait toujours été le favori, même si mes parents ne me le montraient pas vraiment. Je serrais de nouveau un peu plus ma main sur le cosy lorsqu'il me posa justement la question à laquelle je m'attendais le plus. « - Tiens, ça ne m'étonne même pas que les parents ne t'aient pas parlé de ce léger détail. Il est bien connu que je fais tout de travers après tout. Et pour ton information, non, il s'agit de ma fille, Morgane. » déclarais-je amèrement, sentant de nouveau de l'énervement poindre envers mes parents. Ils n'avaient donc même pas parlé de l'existence de leur petite fille à leur fils ? Mais de mieux en mieux, dîtes-moi. Enfin bref, j'allais tout faire pour ne pas perdre mon sang-froid et péter un câble en plein milieu de ce starsbucks, même si je ne comptais malgré tout pas mâcher mes mots maintenant que je me retrouvais face à mon aîné. « - Je ne vais pas y aller par quatre chemins. C'est vraiment pour t'éloigner de moi que tu t'es tiré de l'Italie, en plus de vouloir commencer ta carrière ? » lui demandais-je froidement, plongeant mon regard dans le sien tout en scrutant ses pupilles d'un air mi-méfiant et mi-hostile à la fois.

C'était juste extrêmement dur d'en vouloir à mon frère en voyant à quel point il était adorable avec moi dés qu'il me voit, et en sachant également que ce n'était pas sa faute et que c'était visiblement simplement nos parents qui nous avaient -involontairement, évidemment- nous liguer l'un contre l'autre, même si c'était plus à moi qu'à lui qu'on avait prit la tête pour me liguer contre lui. Je poussais un léger soupir lorsqu'il me déclara que j'avais de la chance d'être père. Ouais, enfin.. à mes yeux c'était pas du tout le cas au départ. J'avais mis pas mal de temps à m'habituer à ma condition de père à 19 ans et encore aujourd'hui, plus d'une semaine et demi après l'arrivée de la petite, j'avais du mal à réaliser ce qui m'arrivait. Je déposais le cosy par terre, détachant la petite qui y était sagement couchée malgré qu'elle était réveillée et je la pris dans mes bras, la maintenant contre moi à l'aide d'une main qui était contre sa tête tandis que l'autre la soutenait en dessous des fesses. Elle jeta un coup d'oeil intéressé à mon frère, qui n'était pour l'instant qu'un vague inconnu pour elle, même si j'avais l'impression que ça n'allait pas durer bien longtemps. « - Tu veux la prendre ? » lui demandais-je tout en caressant tendrement la petite tête chevelue de la petite. Elle me regarda ensuite, l'espace d'un instant. C'était dans ces moments-là où je constatais que Kevin avait raison ; elle me ressemblait vraiment comme deux gouttes d'eau. Un peu comme si je l'avais fait à moi tout seul, en faite. Elle avait déjà la même couleur de cheveux que moi, ses yeux étaient identiques aux miens, son regard était le même, les lèvres idem, sa peau était légèrement bronzée tout comme moi.. Mon portrait version bébé féminin.. Je poussais un léger petit soupir avant de lui expliquer l'histoire de l'arrivée du nourrisson dans ma vie, sachant qu'il me la demanderait de toute façon. « - C'était pas prévu, du tout. J'avais une copine et je pensais qu'elle se protégeait, puis du jour au lendemain on s'est séparés comme de toute façon on ne s'intéressait plus mutuellement et il y a bientôt deux semaines maintenant, des flics sont venus sonner à la maison avec un paquet dans les bras en m'annonçant que j'étais père. C'était une sacrée gifle au départ et il me faut encore le temps de m'habituer maintenant. » lui racontais-je en poussant un petit soupir. C'était bien loin de ce que je m'étais attendu mais je ne comptais pas abandonner les études malgré tout, que du contraire. J'étais plus déterminé que jamais à devenir chanteur, juste pour suivre mon rêve mais aussi pour que Morgane soit fière de moi lorsqu'elle soit plus grande. C'était trop classe de pouvoir se venter à ses compagnons de classe qu'on est la fille d'un chanteur, non ? En tout cas, moi j'en avais toujours rêvé et pourtant mes parents ne bossaient nullement dans un milieu célèbre, ni l'un ni l'autre. J'écoutais mon frère parler et je sentis mon coeur se serrer douloureusement dans ma poitrine. Je savais à ses paroles que toute ma rancune à son égard allait s'effacer en un rien de temps, et d'ailleurs, c'était déjà fait. « - Nos parents, ce sont eux qui m'ont dit ça. Je suppose qu'ils ont toujours tenté de nous mettre en rivalité, toi et moi. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais ils ont toujours tenté de nous mettre en discorde. Famille de merde ... » marmonnais-je entre mes dents, me disant que j'allais réellement finir par faire un meurtre en rentrant au pays. Quelle famille de merdeux, je vous jure.

Franchement, quelque chose m'échappe dans la logique de mes parents. En général, les parents normaux ne supportent pas que leurs enfants ne s'aiment pas entre eux et font tout, absolument tout pour essayer que leurs bambins s'entendent, tandis que ces mêmes enfants n'en ont strictement rien à secouer l'un de l'autre et font tout pour être différents. Avec Loïc et mes parents, ça avait été le contraire. J'avais toujours été proche de mon frère lorsque nous étions enfants et nos parents, en faisante des différences de favoritisme grosses comme des maisons m'avaient en quelques sortes poussé à haïr mon frère, alors qu'il n'y était foutrement pour rien. Mais bon, comment voulez-vous raisonner un gosse qui ne voit qu'une seule chose : que son frère est nettement plus aimé que lui et que ses parents ne se privent pas pour le montrer et le dire à qui veut l'entendre ? Quoi qu'il en soit, à voir la direction plutôt sympathique que prenait la discussion, j'avais l'impression de retrouver mon aîné comme auparavant, comme à l'époque où nous n'étions que des gosses qui étaient proches comme les cinq doigts de la main. Aussi, après avoir reçu des explications de sa part et que je lui aie donné ma version des faits, je lui demandais s'il voulait tenir sa nièce dans ses bras et rapidement, avec un sourire énormissime sur le visage, il accepta. Je la lui mettais dans les bras tout en ne pouvant pas me retenir de rire légèrement en voyant l'expression toute tendre et toute mignonne qui prenait possession du visage de mon frère. « - Cela fait si longtemps que ça que tu n'as plus été en contact avec un bébé ? » lui demandais-je, un petit sourire moqueur mais pas méchant aux lèvres. Moi qui, en l'apercevant, pensait que ça allait terminer en véritable bataille générale, … j'étais bien loin du compte, finalement.

Je lui expliquais brièvement ce qu'il s'était passé avec la maman de Morgane, poussant un léger soupir une fois que j'eus terminé. J'avais malgré tout l'impression d'avoir servi d'objet sexuel à mon ex, qui voulait un gosse depuis son adolescence déjà, et qu'une fois qu'elle à eu cet enfant, elle pensait pouvoir se barrer avec tranquillement et que finalement, le destin lui a fait un pied de nez qui l'a fait mourir en donnant naissance à la petite. Franchement, je voyais ça comme ça, même si je le gardais pour moi, bien évidemment. Je me contentais de hocher lentement la tête lorsqu'il me donna sa version des faits pour expliquer le comportement franchement bizarre de nos parents et je pris doucement la petite main de mon bébé, toujours présent dans les bras de son oncle, dans la mienne tout en souriant légèrement. « - Faudra qu'on aie régler ça au pays un jour.. Tenter de connaître enfin leurs véritables motivations. N 'est-ce pas mon cœur ? Faudra aller te présenter à tes sadiques de papy et mamie, un de ces quatre … » déclarais-je, au départ pour mon frère et pour finir à Morgane, qui me regardait sans vraiment comprendre de quoi je parlais. Elle se contenta de sourire légèrement tout en gesticulant dans tout les sens, portant son regard sur son tonton. Bizarrement, je sentais que lorsque je ressortirais de ce café, ma vie allait être changée à tout jamais. J'avais enfin retrouvé mon frère aîné et c'est tout ce qu'il m'importe pour l'instant, bien honnêtement. «  - Je suis content de t'avoir retrouvé aussi, crois-moi. » déclarais-je, en toute honnêteté. Je l'aurai sans doute prit dans mes bras pour une accolade fraternelle s'il n'avait pas eu la petite dans mes bras mais, réflexion faite, je préférais autant garder ma fille entière et non pas en hâchis parmentier entre son oncle et son père.